Fruit d’une collaboration singulière, l’exposition réunit deux univers complémentaires. Ramia, artiste plasticien engagé, conçoit l’art comme un moyen essentiel de préservation du patrimoine immatériel. Son travail hybride, mêlant peinture et matériaux recyclés tels que le carton ondulé, puise son inspiration dans les « ohabolana » (proverbes) et « hain-teny » (poésies traditionnelles). Par le jeu des déchirures, empreintes et textures, il évoque la fragilité du souvenir tout en célébrant la résilience des racines culturelles. Ses œuvres deviennent de véritables refuges où la mémoire collective trouve un écho vibrant, symbolisant l’importance cruciale de la parole et de l’image dans la transmission.
Mahefa Rasamuel, quant à lui, explore la mémoire sous un angle plus intime et social. Certaines de ses créations, réalisées avant le 25 septembre, prennent aujourd’hui une résonance forte face aux récents bouleversements à Madagascar. L’œuvre « Souffles coupés », par exemple, illustre une mère et son enfant dans une atmosphère lourde et oppressante, où la palette sombre associée au drapeau malagasy traduit la vulnérabilité d’un peuple confronté à la violence. Pour Mahefa, ses matériaux - cartons marqués par les griffures de sa chatte Caipi, sable, marc de café - incarnent la trace du vécu, une mémoire inscrite dans les détails du quotidien. Son art se veut un témoignage sensible, à la croisée de l’histoire individuelle et collective, rappelant que la mémoire se cache aussi dans les gestes ordinaires.
Dans cet espace d’exposition, les œuvres de Ramia et Mahefa se répondent et tissent un dialogue subtil entre culture et intimité, permanence et effacement.
« Empreintes » invite chacun à une réflexion sur la place profonde de la mémoire dans un monde où tout évolue sans cesse. Chaque trace, chaque œuvre devient un récit à part entière, un appel à se souvenir pour mieux avancer. A La Rhumerie, Ivandry, le public est ainsi convié à une expérience artistique riche en émotions, une immersion dans la profondeur des empreintes laissées, entre héritage ancestral et vécu personnel. Cette exposition souligne avec force que, face à la fugacité du temps, l’art reste un vecteur irremplaçable de mémoire et de transmission.
Si.R